Ballades et escales en littérature africaine

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11
avr 2010
**** Couao-Zotti, Si la cour du mouton est sale ce n’est pas au porc de le dire.
Posté dans Couao-Zotti, _ BENIN _ par Hervé à 2:54 | 20 réponses »

couaozottisilacourdumoutonestsale.jpgComme il se doit, il devrait être de mon devoir de m’effacer. D’ailleurs j’entends vos reproches monsieur l’écrivain : _ Mets toi à l’ombre de l’anonymat pauvre chroniqueur que tu es ! _ Non, Monsieur Couao-Zotti je ne veux ni ne peux me mettre sur la touche. Quelques mots s’il vous plaît. Cotonou, la palpitante capitale économique du Bénin est mon amour. D’ailleurs pourquoi me donneriez-vous des leçons vous l’écrivain de Porto-Novo la silencieuse indolente ? Permettez-moi de rire. Porto-novo n’est pas la sœur jumelle de Cotonou. La seconde est tempétueuse, c’est une créature passionnelle et indomptable à l’image de ses chauves-souris (femmes de nuit de petite vertu) carnassières qui hantent les maquis. Mais je suis de mauvaise foi et malhonnête avec vous. Car ô combien vous aimez cette ville, vous l’écrivain dont l’appétit pour l’agouti est insatiable. Vous la vivez cette cité. Et peu importe qu’elle soit asséchée par ce maudit soleil ou engluée dans la boue durant cette saison barbante des pluies. Je vous comprends. Comme j’aime aussi cette ville cacophonique et bruyante aux vons (rue ou ruelle selon les cas) poussiéreux  où vrombissent ces fourmis à moteur enfourchées par les hommes jaunes : les zems (moto-taxi dont les pilotes ont un gilet jaune pour se distinguer de la masse) qui tête en avant se faufilent entre les voitures immobilisées dans les bouchons où les mendiants tendent la main. On se mettrait presque à aimer les crachats carboniques des petits moteurs chinois des fiévreux deux-roues. Et que dire des cavalcades des 4×4 aux côtés des vieilles 505 rafistolées pour la énième fois par leur énième conducteur. Je ne m’en lasserai jamais. Et c’est avec un vrai bonheur que le lecteur retrouve cette Cotonou retorse dans votre polar qui a tout pour plaire. Vous restituez avec talent le Cotonou interlope. Il fait bon se balader dans les « vons » et autres avenues où vos personnages au commerce pas toujours licite pointent leur mine ; un minois  bien agréable mais ô combien dangereux qu’ont ces déesses, prostituées de luxes, qui ont mis la main sur une valise rembourrée à la cocaïne. Galbe majestueux, poitrine en veux-tu en voilà, il leur tarde de vendre la marchandise contre un gros paquet de Francs CFA quitte à se dévorer entre-elles au partage final. A la panthère la plus audacieuse d’en profiter. Il y a tout de même un obstacle de choix : la valise tant convoitée est la propriété d’un réseau international sur lequel les Libanais ont la main. Hors de question pour leur représentant local, Smaïn, le vieux manchot, à se laisser faire. Amateur de jeunes filles, il en a dévoré des bien plus teigneuses. Qui plus-est, son revolver a la gâchette facile. Voilà du joli monde dans un embrouillamini délicieux. Au plus malin de remporter la mise. Mais c’est sans compter avec le commissaire Santos Guidid et son aide de camp l’inspecteur Kakanakou qui ne font pas partie de ses flics corrompus. Pugnace, le commissaire entend bien mettre au pas cette salsa criminelle et faire camper tout ce petit monde en cellule avant qu’ils ne s’étripent et que la valise ne disparaisse. Mais une tuile en cache une autre pour Santos : un de ses anciens collègues qui a démissionné pour se mettre à son compte comme détective décide à son tour de jouer sa petite partition afin d’avoir sa part du gâteau poudreux. Si la cour du mouton est sale ce n’est pas au porc de le dire est un polar d’excellente facture qui mise sur l’humour à l’image des proverbes à l’en-tête de chaque chapitre : « la brebis broute l’herbe là où on l’attache », « celui qui se baisse pour regarder le postérieur de son voisin ne sait pas qu’il expose le sien à tout le monde », etc. Aucun doute sur  « l’africanité »  de l’écrivain qui laisse cours à son imaginaire rieur pour le plus grand plaisir des lecteurs. Quel délice en outre de profiter d’expressions locales qu’un glossaire en fin de roman éclaire. Autre élément d’importance, F. Couao-Zotti donne un rythme très soutenu à son récit : l’action y est continuelle ; une caractéristique renforcée par le peu de pages (environ six) constituant chacun des 24 chapitres. Voici une nouvelle agréable surprise littéraire que nous offre l’auteur. Le contraire nous aurait surpris de la part d’un Couao-Zotti des plus en forme.

Couao-Zotti, Si la cour du mouton est sale, ce n’est pas au porc de le dire, Le Serpent à Plumes, coll. Roman noir, 2010, 200 p. 


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20 réponses:

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  1. salut.
    Selon moi, c’est un des meilleurs bouquins de Couao-Zotti.
    Ce qui y est décrit est parfois très difficile, mais sa plume est plongée dans l’encre de la réalité. Heureusement le quotidien de Cotonou n’est pas toujours aussi sombre, c’est une ville où il y fait aussi bon vivre
    Ballades et escales en littérature africaine.
    Ferrand Hervé.

  2. Lorraine écrit:

    Lu en intégralité ! Beaucoup aimé, très belle immersion dans le Cotonou d’aujourd’hui, avec du suspense à la clé.

  3. Lorraine écrit:

    Bonjour Hervé !
    Alors figure-toi que j’étais plongée enfin dans la lecture de ce livre, suivant tes recommandations plus que vives, et voilà qu’à la page 110, le bouquin suit avec les pages 47 à 90 !! Me voilà sans issue, sans suite, sans dénouement, et j’attend la réponse des éditions du Serpent à Plumes…. Et dire que le suspense était à son comble !!

    Je te souhaite une très bonne année 2011, sans erreur d’imprimerie pour tes lectures ;-)

  4. Liss écrit:

    Je me suis sans doute mal exprimée, je voulais dire : impossible d’avoir, pour La cour du mouton, récemment primé, le même sentiment que tu as eu lorsque tu as lu le roman de Divassa. Je voulais juste dire que je me réjouissais de ce que le dernier roman de Couao-Zotti ait reçu ce prix. Quant au roman de Divassa, je ne l’ai pas encore lu, c’est que ma PAL est longue et il faut reconnaître que je me dis qu’il n’y a pas urgence, vu ce que tu en penses, mais je pense que quand j’en aurais l’occasion, je le lirai, pour me faire ma propre idée.

  5. Liss écrit:

    Bonjour Hervé,

    que dire après la lecture de La cour du mouton, sinon que je suis super contente pour l’auteur que ce roman ait reçu le prix Kourouma ! Impossible d’avoir le même sentiment que toi en ce qui concerne le roman de Divassa, qui ne mériterait pas tout à fait d’être primé (selon toi).

  6. Ferrand Hervé écrit:

    Bonsoir Liss.
    Florent Couao-Zotti est une personne très sympathique qui aime échanger avec ses lecteurs. Un vrai ravissement.
    En effet, comme les précédents, ce polar est très bon. A juste titre, il est récompensé. En outre, il remporte un vrai succès auprès du public. Tant mieux !
    J’attends avec impatience ton billet sur ce roman.

    Ballades et escales en littéraure africaine.
    Hervé.

  7. j’oubliais : je trouve cette photo meilleure que la précédente.

  8. Cher Hervé,

    je n’ai pas lu ton article, je ne peux que réagir par rapport à ton appréciation positive du roman. J’ai aimé tous les romans de Couao-Zotti et je savais que ce serait la même chose avec ce dernier, d’où son acquisition au salon du livre dernier, d’autant plus que l’auteur était dans le coin, en boubou de Cotonou, et que je pouvais avoir une belle dédicace, que j’ai eu sans difficulté, avec un beau sourire en prime ! Donc affaire à suivre, je reviendrai voir ton papier lorsque j’aurais publié le mien, tu comprends, je garde mes distances et ne veux pas me laisser influencer !

  9. Ferrand Hervé écrit:

    Salut.
    Comment vas-tu depuis ta belle Lorraine ?
    En effet, c’est un prix amplement mérité. Quelle belle plume faite d’un humour irrésistible.
    Ce monsieur aime sa ville… après Porto-Novo bien sûr !

    Ballades et escales en littérature africaine.

    FERRAND Hervé.

  10. Merci Florent. C’est vraiment très sympathique.

    Ce jeune écrivain sait reconnaître les futurs talents !
    Les grands esprits se rencontrent toujours un jour ou l’autre ! lol.

    Je cesse les plaisanteries.

    Je suis vraiment content M. Couao-Zotti que vous ayez remporté le prix Kourouma à Genèvre.

    Si vous n’avez pas lu « Quand la cour du mouton est sale ce n’est pas au porc de le dire »,_ j’adore ce titre ! _, il vous faut au plus vite faire taire cette négligence. Vous passerez un sacré bon moment. Et ce voyage à Cotonou est passionnant.
    Promesse de Tourangeau !

    Hervé

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